Bonjour, bonsoir,
Aujourd’hui j’aborde un thème important pour tous les écrivains, qu’ils soient amateurs ou professionnels. Comme d’habitude, je ne prétends pas posséder la vérité absolue, je vous fais simplement part de mon expérience personnelle. Parce que si vous attendez la Grâce… eh bien je peux vous dire que vous êtes bien mal barré. Sur quoi écrire ? Écrire ou ne pas écrire ? Pourquoi écrire ? Pour qui ? Telles sont les questions qui reviennent inlassablement dans l’esprit de tout scribouillard.
A la base, il faut déjà en avoir envie. On ne décide pas d’écrire un roman comme on décide d’écrire la liste des courses. On peut écrire pour soi, c’est par là qu’on commence tous. On peut écrire pour les autres et c’est à partir de là que ça devient un peu compliqué. Parce que les autres, eh bien révélation : ce n’est pas moi. Un lecteur n’a pas les mêmes attentes qu’un auteur et il y a autant de manières de lire et d’attentes que de lecteurs. On pourrait réfléchir pendant des heures sur le sujet, aligner des lignes et des lignes de débat philosophique plus ou moins cohérentes, mais ce n’est pas mon but aujourd’hui. Écrivez pour votre petit frère, votre grand-père maternel ou votre bigorneau de compagnie, je n’en ai pas grand chose à faire.
(non il n’était pas nécessaire d’intégrer un gif de Ben Whishaw ici)
Vous avez envie d’écrire ? C’est bien. Vous avez choisi votre lectorat, la compagnie de bigorneaux qui squattent l’aquarium de votre salle de bain ? Parfait. Vous avez investi dans le pack : dictionnaire/bescherelle/grammaire pour éviter les « commen sa se fait ke t’ai la » ? Encore mieux. Vous êtes là, avec votre bic quatre-couleurs ou votre clavier d’ordinateur, et vous attendez la grâce. C’est là que ça se corse (et c’est aussi là que le gif ci-dessus se justifie, comme quoi tout arrive).
Je suis d’avis qu’à partir du moment où on écrit pour quelqu’un d’autre que soit-même, c’est parce qu’on a un message, une émotion, un ressenti à faire passer, même minuscule et tant pis si c’est pas très intelligent. Sinon ça s’appelle, au mieux de la masturbation intellectuelle, au pire du branlage de clavier ou du « j’me regarde écrire et je trouve ça cool ». Attention, je ne dis pas que c’est le Mal absolu, il y a des textes que je juge masturbatoires qui sont cool quand même, mais c’est – comme dirait un ami à moi – vraiment pas ma came.
Personnellement, j’ai toujours plein de trucs à dire dans mes histoires. J’aime provoquer mon lecteur (même si c’est un bigorneau) et lui poser des questions. Forcément, il y a des sujets qui me touchent plus que d’autres, des messages que je m’évertue à glisser subtilement, l’air de rien, comme si tout était normal en croisant les doigts de pieds pour qu’il pénètre le subconscient de mon lecteur. Je vais dire un truc très con, mais c’est important d’écrire sur un sujet important pour soi. Tout est dans le « pour soi ». C’est très intéressant de décider d’écrire sur l’avortement des femmes en Espagne, mais si ça ne vous touche pas un minimum, autant laisser ça à quelqu’un d’autre.
J’en viens donc à ce que j’appelle « les gros sujets« . Parce qu’un écrivain peut être engagé s’il en a envie. Il y a foule de gros sujets qui ont plus ou moins la côte. En vrac : la condition des femmes, le trafic d’enfants, la libre-circulation des armes, la mafia russe, la dépression chez l’adolescent, la maltraitance des animaux, l’immigration, l’homosexualité, la conquête spatiale, la seconde Guerre Mondiale, le réchauffement climatique, la transsexualité chez le bigorneau… La liste pourrait faire des kilomètres. J’encourage l’utilisation de ces thèmes, vivement. Mais pas n’importe comment… Il faut d’abord savoir de quoi on parle. Pour ne pas faire de bourde intersidérale.
Je me souviens d’un texte écrit par un de mes potes, un type que j’aime beaucoup pourtant. Amoureux des thèmes bien trash, il avait écrit un texte à base de transsexualité (pas d’un bigorneau cette fois) et de viol. Why not. Il me l’avait donné à corriger, jusque là tout allait bien. Sauf que voilà, ça se voyait qu’il avait pas réfléchi plus de dix secondes à son sujet. Pourtant le mec, les thèmes LGBT, ça le connait ! Enfin visiblement, le T moins que le LGB. ça m’a pris dix minutes de ma vie pour lui expliquer pourquoi son texte était bourré de clichés, ne tenait pas la route et surtout risquait de déclencher la fureur de connaisseurs. Il a dit « putain mais t’as raison » et le texte est passé – à mon grand soulagement – aux oubliettes.
Je prends cet exemple pour expliquer à quel point il peut être nécessaire de connaître son sujet si vous ne voulez pas que votre lecteur fasse cette tête-là :
La documentation est l’une des choses les plus importantes. Même si vous écrivez un roman à l’eau de rose entre un crayon et un taille-crayon, imaginez que vous vous trompiez entre la mine HB et la mine 2B, ça pourrait avoir des conséquences dramatiques. Écrire implique d’essayer de ne pas dire trop de conneries. Ce que vous écrivez, surtout si vous le publier quelque part, est normalement destiné à la lecture et peut-être à la postérité. Que ce soit en bien ou en mal. Donc, on fait gaffe.
J’en viens enfin à ce que dont je voulais parler à la base : faut-il écrire sur son expérience personnelle ? Ou pas. Il est vrai que parler de ce qu’on a vécu, c’est ce qu’il y a de plus « vrai ». Mais c’est loin, très loin d’être simple. Parce qu’on est malheureusement jamais objectif. Et puis, déjà quand on écrit une histoire quelconque, on se met à poil. Mais alors si on parle de soi, c’est comme sortir ses tripes et les donner à bouffer au lecteur. Je sais que quand j’utilise clairement mon expérience perso, je supporte assez mal (pour ne pas dire : pas du tout) les critiques sur mon texte. Même le relevé d’une faute d’orthographe me met en rogne. On comprendra pourquoi, le plus souvent, j’évite de parler clairement de moi.
Le conseil que je peux donner, c’est de s’inspirer de son histoire personnelle et de celles des autres. Un écrivain, c’est comme un moustique. Il va pomper le sang de tout le monde. C’est comme ça qu’on crée des personnages et des histoires riches et crédibles. C’est comme des legos, il faut plein de petites briques de couleurs différentes pour faire une fusée digne de ce nom ! C’est comme ça qu’un personnage se retrouve avec le physique d’une inconnue que vous avez croisée dans la rue, le caractère de votre voisine en cours d’Allemand, les Rangers d’un de vos potes et votre goût certain pour les rouquines. Oups, pardon, ça c’est mon Ingrid.
Bref, je vais conclure cette article en vous encourageant à réfléchir sur quoi vous écrivez et pourquoi vous le faîtes, à acheter un dictionnaire, à mettre wikipédia dans vos favoris et à prendre discrètement des notes sur vos potes pour en faire des personnages.
Bonne journée !
11 comments
[…] en long et en large pourquoi il ne fallait pas écrire sur n’importe quoi dans mon article Sur quoi écrire. L’imagination, oui. Avec de l’imagination, on peut essayer d’écrire sur tous […]
Oooooh, merci de nous envoyer la Grâce avec Ben Whishaw aka John Keats!
Nan plus sérieusement, je ne vous remercierai jamais assez pour votre site. J’avoue ne pas être bien fan des méthodes et des pseudo-cours d’écriture qui vont à la fin tous nous uniformiser, mais en cas de doute ou d’interrogation, il est fort appréciable de pouvoir se nourrir de l’expérience d’un autre. J’aime beaucoup votre humour, aussi.
Merci pour tout!
Salut !
J’ai découvert ton blog il y a pas longtemps, et je le trouve très bien. J’apprécie la manière dont tu rédiges tes articles, les petites anecdotes perso que tu glisse dedans, les phrases qui te sont propres… On voit bien à quel point tu aimes ce que tu fais et que tu sais de quoi tu parles.
Maintenant, j’ai un problème. Les mots » branle « , » masturbation « , tes » c’est comme si vous vous masturbiez sur votre clavier » et autres que tu nous sors quasiment à chaque fois pour nous citer une histoire que tu n’as pas aimée sur Internet me gênent vraiment. C’est chiant, chiant, chiant. Stop. Arrête. Tu n’as pas besoin de les employer tout le temps pour nous décrire ce que tu ressens devant ces textes tellement pourris que tu lis je ne sais où sur le web.
Voilà. Sinon, à part ca, je suis fan! Bonne continuation!
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je plussoie tout cela, bien sûr.
Mais si je laisse un commentaire, là, c’est juste pour dire que j’ai adoré ton analogie …
« s’inspirer de son histoire personnelle et de celles des autres. Un écrivain, c’est comme un moustique. Il va pomper le sang de tout le monde »
Voila.
Bonne soirée !
Merci ! On est de sales vampires hahaha <3
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